Collectif d'Action et de Lutte contre les Jeux A Risques
icône RSS icône Emai icône Accueil
  • http://www.viva.presse.fr

    Posté le juin 23rd, 2009 Caljar 7 commentaires

    Ces jeux dangereux, pour nos enfants

    « T’es pas cap de plus respirer » : dans les cours de récré on croit que c’est sans risque, mais parfois la mort est au bout. Une association de parents de victimes veut mettre ces pratiques hors jeu.

    Romain avait douze ans, Magali, treize, Christophe, dix, et Anne-Lise, quinze ans. Comme une trentaine d’enfants par an, ils ont joué au jeu du foulard et ils en sont morts. Ce jeu, que les adolescents des années 1970 appelaient le rêve indien, consiste en un étranglement volontaire réalisé seul ou à plusieurs et dont l’objectif est de vivre une expérience forte, de connaître des sensations nouvelles. Il s’agit de conjuguer une hyperventilation forcée obtenue par quelques flexions rapides des jambes et de grandes inspirations. Puis de bloquer la respiration tout en appliquant une pression sur la carotide, voire en comprimant fortement le sternum. Un évanouissement se produit, précédé de sensations de type hallucinatoire.
    Cette pratique de cour d’école, d’apparence anodine, existe depuis longtemps. Beaucoup d’élèves et de parents en ont entendu parler, tout comme le jeu de la tomate – pratiqué même dans les écoles maternelles –, qui consiste à cesser de respirer jusqu’à provoquer une syncope. Trop peu en revanche connaissent les risques que peuvent entraîner ces jeux qui n’en sont pas. Ils tuent ou, à cause de la privation d’oxygène, entraînent des séquelles irréversibles au cerveau. D’abord, l’enfant ou l’adolescent teste le jeu, à plusieurs souvent, dans les cours de récréation, en centre de loisirs ou en colonie de vacances pour relever un défi, pour « être cap », sous la pression du groupe.

    « Il est tombé en syncope »
    Chloé, seize ans, témoigne : « Un ami m’a dit qu’il voulait avoir un flash. Il m’a expliqué qu’il allait faire des flexions en respirant très fort et que, quand il sera arrivé à un certain nombre, il allait rester debout et il fallait alors que je lui appuie très fort sur le sternum, mais qu’on devait être prêts, mon autre ami et moi, à le retenir car il allait tomber de tout son poids. J’ai effectué tout ce qu’il m’a dit et il est tombé comme une masse, convulsé et les yeux révulsés. J’ai dû lui mettre des claques pour qu’il se réveille. Il m’a proposé de le faire. Comme j’avais eu très peur, j’ai eu la chance de refuser. » Ou encore Simon, quatorze ans : « Si j’ai pratiqué ce jeu, c’est parce qu’un ami nous avait tous convaincus de le faire et qu’il n’y avait pas de danger. Son père était médecin et son oncle chirurgien, alors on lui a fait confiance. »

    Un pic de mortalité à 12 ans
    Par la suite, l’enfant ou l’ado peut être tenté de renouveler seul l’expérience, à l’aide d’un lien quelconque. Le risque est alors majeur, personne ne pouvant alerter les secours en cas d’étranglement prolongé après la perte de connaissance. Chaque année en France une dizaine d’enfants et d’adolescents de 7 à 18 ans en meurent. Le pic de mortalité se situe à 12 ans. Les victimes, en majorité des garçons, sont issues de tous les niveaux sociaux, et souvent même de milieux très favorisés.

    Pour le Dr Jean-Claude Fisher, psychiatre spécialiste de l’adolescence, « le jeu du foulard n’a rien d’une conduite à risque – comme peuvent l’être des pratiques addictives, telles la consommation d’alcool, de drogues… ». Dans ces situations-là, le jeune connaît les dangers et s’y mesure volontairement. « Avec le jeu du foulard, nous sommes dans un tout autre cas de figure : l’enfant ou l’ado ne sait pas ce qu’il risque. Voilà pourquoi la plupart des victimes sont des enfants qui allaient bien, qui n’avaient pas de conduites morbides ni n’étaient suicidaires. Ils aimaient vivre, jouer. » « Ce n’est pas une conduite à risque, affirme également Hakima Aït El Cadi, sociologue au Cnrs, spécialiste de l’adolescence (faculté de la Timone, à Marseille). Dans la conduite à risque, on sait qu’il y a danger de mort, mais on fait quand même. Là on croit seulement que c’est un jeu et la mort est quelquefois au bout. »

    Grâce à ces professionnels, on sait que l’information et la prévention sont efficaces. Une fois avertis des risques encourus, les enfants et les ados cessent généralement un jeu dont ils ne mesuraient pas les conséquences. La volonté de transgression reste rare. Malheureusement, pendant longtemps, et de peur « de populariser la pratique », médecins, enseignants et tous ceux qui interviennent auprès des jeunes ont préféré taire les dangers de cette pratique. C’est ce que dénoncent les parents d’enfants victimes, qui lancent une grande campagne d’information. Ils ont ainsi crée l’Association de parents d’enfants accidentés par strangulation (Apeas) et un site Internet. Son but : transmettre au plus grand nombre un maximum d’informations sur les dangers de cette pratique.

    [02.11.07]

    - Anne-Marie Thomazeau

    Jeux de mains…
    Ils portent différents noms : le « jeu » du cercle infernal, de la cannette, du mikado, du bouc émissaire, du petit pont massacreur, de la mêlée, du jugement, du petit pont boulette ou de la tatane. Le principe est toujours le même. Au sein d’un cercle de jeu, un objet est lancé aux joueurs à tour de rôle, celui qui ne le rattrape pas devient la victime et est alors roué de coups par les autres participants. Courant également, le happy slapping, en français « joyeuses claques » : c’est une pratique consistant à filmer avec son téléphone portable une agression perpétrée par surprise puis de diffuser ces images. Ces jeux peuvent avoir des conséquences graves – hématomes, fractures, séquelles neurologiques –, voire mener à la mort. Les conséquences psychologiques peuvent aussi être importantes, et entraîner une dépression, une phobie scolaire et parfois, même, des idées suicidaires.

    Ce qui doit alerter

    La pratique du jeu du foulard n’est pas une tentative de suicide. Elle s‘accompagne rarement de comportements étranges. Quelques détails peuvent cependant alerter les parents :
    - des traces suspectes sur le cou (parfois camouflées)
    - lien, corde, ceinture, que le jeune prend sans raison dans ses affaires
    - maux de tête, douleurs auriculaires
    - diminution de la concentration
    - rougeurs sur le visage
    - bruits sourds dans la chambre (chute dans le cas d’une pratique solitaire)
    - questions posées sur les effets et les dangers de la strangulation.